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Le style vestimentaire comme véhicule de pensée autonome

Rococo, néoclassicisme, surréalisme, minimalisme, glam, futurisme, punk, postmodernisme… Ces styles vestimentaires incontournables constituent tous à leur manière des exemples de mouvements de contre-culture autonomes. Ils se succèdent, s’enchevêtrent et se répondent mutuellement, tout en répondant au système de dominance normative.

Terme très galvaudé, l’autonomie peut prendre plusieurs tangentes et niveaux de compréhension. De prime abord, identifier les conditions qui nous forgent permet de mieux saisir ce que signifie la portée de l’autonomie. Cependant, qu’elles soient de nature matérielle, sociologique, culturelle, ou philosophique, les conditions ne doivent pas systématiquement nous définir. Être autonome n’accentue pas nécessairement la notion d’isolation ou d’insensibilité aux agents extérieurs pouvant affecter les diverses sphères de nos vies. Au contraire, l’autonomie peut refaçonner notre culture en construisant une perception de nous-mêmes fondée sur une approche critique de la transgression des codes sociaux.

En optant pour une approche positive sur l’harmonisation des individus par l’émancipation collective, j’ai la conviction que la révolution peut commencer par la création d’un nouveau langage vestimentaire. Ce langage vestimentaire n’est pas connoté par le regard imposé par les conglomérats de l’industrie du textile. Ces derniers prétendent détenir la vérité en matière de goût et de tendances, au dépourvu de l’expression d’une catharsis, ou d’une impulsivité émotive que tout un chacun porte en elle et lui. De ce fait, arborer un style qui transcende les normes du vestiaire féminin et masculin en jouant avec les lignes droites et épurées, des coupes surdimensionnées ou bien des motifs ludiques, permet d’élaborer un système de pensée autonome. Celle-ci est alors dénuée du format des conventions, lesquelles limitent nos ambitions personnelles et mènent à nous percevoir sous une lentille réductrice.

Porter un vêtement permet d’afficher clairement sa ligne de pensée et d’émettre un discours non-verbal qui peut transformer l’imaginaire collectif d’une manière encore plus véhémente qu’une analyse verbale. Porter une identité vestimentaire devient alors un mouvement autonome pour combattre nos oppressions. Chaque jour, je choisis ma tenue en fonction d’un sentiment d’appartenance à une communauté ou à un rôle distinctif. J’appartiens ainsi à une multiplicité de points de vue favorisant mon attitude indépendante, en symbiose avec mon élan créatif. Je me nourris de cette autonomie pour fortifier mon quotidien. Ainsi, j’essaie de jouer avec les codes vestimentaires pour projeter ma manière de voir les enjeux sociopolitiques. Parfois, à travers une tenue sophistiquée, banale, modeste ou avant-gardiste, j’interroge de manière consciente les solutions pour pallier nos propres impunités. Le potentiel autonome du vêtement s’engage alors dans une conversation qui élève nos tabous et nos incompréhensions à un niveau évolutif.

L’autonomie de pensée passe ainsi par l’évolution constante de l’appropriation du style vestimentaire et se place en rupture avec l’élitisme et la culture dominante. Former une société hétérogène, à la recherche d’un caractère subversif et accessible, se révèle être un objectif pour démocratiser un monde sain et proactif.

Charles Sirisawat est un blogueur de style basé à Montréal. Passionné par l’industrie de la mode et par le travail d’artisanat, il nous livre sa vision d’une approche au style personnelle, créative et soutenable.

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